Bonjour à toutes et à tous ! Moi, c’est Audrey, je suis étudiante en licence de communication pour être ensuite, un jour peut-être, journaliste sportive. Je suis en stage à parieur pro pour faire des interviews pour gagner un peu d’expérience et pour connaitre un peu plus le monde des paris sportifs. Je fais ces interviews pour le club de David et pour aider les membres du club à mieux connaitre ce monde. Donc, aujourd’hui, j’interview Antoine. Vous le connaissez probablement. Il fait partie de l’équipe de parieur pro, qui est ami avec David depuis un bout de temps. Il avait déjà fait une interview avec David en 2019 sur son parcours.
Le parcours d’Antoine
Audrey : Bonjour, Antoine
Antoine : Bonjour, Audrey
Audrey : Est-ce que tu peux te représenter rapidement ? Même si les gens peuvent te connaitre déjà vu que tu fais quelques vidéos, sur la chaine YouTube et que tu avais fait une interview. Peux-tu te représenter rapidement pour les nouvelles personnes ?
Antoine : Oui, bien sûr ! Mon profil peut-être. Moi, j’ai été prof de Math, c’est le cursus que j’ai suivi après mon bac. J’ai été prof de math pendant 3-4 ans. J’ai commencé à parier dès mes 18 ans, quand j’étais même étudiant? J’y suis tombé par hasard et depuis j’ai toujours parié de manière plus ou moins appliquée, car je peux ne rien faire pendant 2 mois, etc. Je me disais, ça peut être intéressant, il y a peut-être moyen de gagner un petit peu d’argent avec ça.
Je n’envisageais pas d’en vivre ou d’en faire mon métier. Mais je me disais que ça peut être un complément, ça rapporte un peu de fun, etc. J’aimais bien le sport et je me disais que je pourrais potentiellement gagner un peu d’argent en plus. Puis finalement, de fil en aiguille, avec de l’expérience an plus dans les paris, en voyant notamment du contenu sur internet, sur YouTube, sur des clubs, des forums, etc.
Petit à petit, j’ai commencé à gagner de plus en plus en me focalisant sur un seul aspect, le basket. Ma spécialité, c’est le basket. Du coup, j’en suis arrivé finalement à me décider d’arrêter mon activité de prof de math pour passer. Au début, c’est à mi-temps, ensuite, complètement parieur pour voir si ça me plaisait ou pas.
Et là, ça fait 6 ans que je gagne ma vie avec les paris. Finalement, c’était possible, je ne le croyais pas au début. Puis, je continue chaque année d’apprendre de nouvelle chose, de m’améliorer. C’est un milieu qui évolue constamment, ce n’est pas routinier. Je suis content actuellement d’être ce que je suis devenu.
Attirance pour les paris sportifs
Audrey : D’accord ! La première question que je vais te poser c’est : qu’est-ce qui t’a attiré dans les paris au tout début ? C’est parce que tu aimais bien le sport et que tu voulais juste essayer là-dedans, ou tu es arrivé vraiment par hasard ?
Antoine : Mon premier pari, j’étais rentré dans un bar. J’ai vu des matchs de foot avec des chiffres, etc. Je ne savais pas tout ce que c’était. Je l’ai découvert, pas sur internet, mais en un lieu physique, dans un bureau. J’avais demandé comment ça se passait. Il m’avait dit, tu peux miser par exemple 10 euros sur qui l’équipe qui gagne. Ta mise de 10 euros sera multipliée par la cote de l’équipe, etc.
C’est comme ça que j’ai commencé. Je me suis dit, je vois bien que telle équipe gagnait, j’ai mis une petite somme, 10-20 euros, au début. Je me disais, c’est possible de gagner un petit peu d’argent. Au début, ça parait facile. Je connais le sport, c’était le foot à l’époque le sport que je suivais, c’était les matchs de ligue des champions.
C’est un petit truc que je sais déjà quand j’étais plus petit, quand j’avais 16-17 ans. Je me disais, c’est possible, potentiellement, de gagner un peu d’argent sur ça. Je n’avais pas du tout conscience de la difficulté, de l’aspect addiction qu’il peut y avoir, de tout ce qui englobe ça.
Audrey : Et de l’aspect aléatoire, et de tout ce qui intègre…
Antoine : De l’aspect aléatoire, mathématique, variance, etc. c’est très complexe. Mais au début, quand on le découvre, on ne connait rien de tout ça.
Démocratisation et accessibilité des paris sportifs
Audrey : Et ce qui t’a fait rester dans les paris, c’est vraiment le fait de découvrir toutes ces choses-là, tout ce qui fait les paris sportifs et de réussir à gagner en t’entrainant ?
Antoine : Ce qui m’a fait rester, honnêtement, je ne sais pas trop. Parce que pendant des années, je perdais, je ne tenais pas de compte comptabilité. J’ai commencé, je pense que c’était en 2006. J’ai perdu pendant 4-5 ans, j’ignore quelle somme, j’ai du mal à les estimer.
Puis, à partir de 2010, l’État a régulé le marché des paris sportifs en France. Et là, on a eu accès à une dizaine de sites sur internet. Je pense que ça a peut-être donné un petit coup de boost. Dans le bon ou dans le mauvais sens, ça dépend comment on le voit. Mais là, je me suis inscrit sur différents sites, il y avait beaucoup plus de marchés possibles, c’était beaucoup plus facile de chez soi.
Carte bancaire, je dépose 100 euros, je les ai directes, alors qu’avant il fallait se déplacer physiquement dans le bar, il fallait retirer de l’argent si je n’en avais pas. Je ne pouvais pas y aller si c’était le dimanche, c’était fermé. Finalement, je pense que ce qui a fait continuer, c’est le fait notamment d’avoir accès à internet, d’avoir différent…
Audrey : Ouais, la facilité, l’accessibilité
Antoine : L’accessibilité, oui. Après, j’étais sans méthode pendant des années. Je pense que j’avais une petite forme d’addiction. Peut-être pas très grande, mais une forme d’addiction quand même, je pense, parce que j’ai quand même fait ça pendant 7-8 ans en perdant de manière régulière, sans stratégie.
Et pourtant, j’ai continué. Alors pourquoi j’ai continué ? Même moi, je ne le sais pas. C’est parce que j’ai eu la croyance que c’était possible. Ou parce que j’ai eu un côté addict et j’avais besoin de ça. Je ne pense pas, mais c’est toujours dur à avouer quand c’est ça aussi.
Savoir se spécialiser
Audrey : Ou tu ne saurais pas trop quoi dire précisément,
Antoine : Là où j’ai pris un tournant, c’est quand j’ai commencé à gagner sur le type de marché en basket que je fais désormais. Ça s’appelle les cotes, c’est le nombre de points en basket. Je me suis rendu compte que dans mon historique, parce qu’au bout d’un moment, j’ai quand même noté mes paris dans un tableur pour savoir ce que je gagnais, ce que je perdais.
Et je regardais sur mes résultats uniquement de basket. Là, j’étais gagnant. Alors, je me disais, « peut-être, Antoine, que tu tiens quelque chose sur ça, arrête de jouer sur le foot, tu ne connais pas ; arrête de faire le tennis en live, etc. Concentre-toi sur ce truc-là ». Et petit à petit, je me suis concentré sur ça, et je voyais que j’y étais rentable. Donc, ça m’a peut-être « ouvert la porte » de continuer et de gagner, et d’avoir les stratégies.
Audrey : Oui, tu t’es dit que c’était possible à ce moment-là d’être plutôt régule
Antoine : C’était possible. Il fallait se spécialiser sur un aspect particulier. Ne pas être généraliste comme je l’étais au début, comme tout le monde l’est un peu au début.
Ses débuts dans les paris sportifs
Audrey : Dans l’interview avec David, il y a deux ans, tu avais dit que tout au long de ton parcours, tu avais traversé des étapes un peu difficiles. Et tu as même dit que tu avais fait toutes les erreurs possibles dans les paris sportifs, mais tu as quand même continué à faire des paris. C’était vraiment difficile au début de gérer les pertes ou au contraire, tu perdais et tu te disais que c’est toujours possible de gagner après ? Ou ça t’influençait beaucoup, ça t’impactait beaucoup ?
Antoine : Honnêtement, je ne sais plus comment c’était. Ça fait 15 ans. Au début, c’était vraiment des petites sommes, je pense que c’était du 5 euros, 10 euros. Assez vite, ce que j’explique dans la vidéo avec David, le premier type de pari que j’ai fait, c’était combiner des matchs nuls au foot.
Parce que je m’étais dit, les matchs nuls, c’est peut-être peu parié par les gens. Donc, j’ai fait des combinaisons de 2 parmi 20 puisqu’à l’époque, on ne pouvait pas jouer en simple. Du coup je pouvais avoir de très bon résultat s’il y avait 7 ou 8 matchs nuls sur les 20 matchs que j’avais pris. Sans analyse, c’est juste en voyant les cotes.
C’était juste en me disant « les gens ne doivent pas parier sur les matchs nuls », donc, je le fais, je combine tout entre eux. J’ai fait de très belles séries tout comme j’ai fait dès fois de très mauvaises séries où il y a 3 sur 20. Du coup, si j’avais engagé 200 euros, je retrouvais 10 à la fin. Une fois j’ai engagé 200 euros, comme c’était la combinaison, les sommes sont assez élevées, mais je récupérais 300. Donc, au début, c’était quand même assez dur. Après …j’oublie la question,
Audrey : est-ce que les périodes de pertes, au début, ça t’impactait beaucoup ?
Gérer les périodes de pertes
Antoine : Ça m’impactait plus au début que maintenant. Parce que maintenant, j’ai beaucoup plus de connaissance dans les paris sportifs, dans la variance, etc. Je sais que c’est normal de perdre sur une certaine durée sur un certain nombre de paris. Avant, je n’acceptais pas de perdre.
Puisque j’ai aussi dit dans l’interview avec David c’est que si j’accumulais les pertes, ça, c’est plus quand j’étais sur les sites, sur internet. Si j’accumulais les pertes, j’avais envie de miser plus vite pour me refaire. Je me disais, ça m’énerve, j’ai perdu 3-4-5 fois de suite, ce n’est pas possible, la 6e fois, ça va finir par passer.
Donc, je misais plus. Si ça ne passait pas, je remisais plus la 7e fois. Ça, c’est ce qu’on appelle un peu la montante, c’est évidemment une des pires erreurs parce ce qu’on peut griller énormément d’argents sur un seul pari.
Audrey : Du coup, tu as dû apprendre à gérer ton aspect mental. Tu y es arrivé seul ou tu as été aidé ? Ou dès le début, ça allait ?
Antoine : Non, j’étais tout seul parce que c’est un truc dont j’ai peu parlé au début. Parce que comme j’étais perdant, je n’en parlais pas. Je n’avais pas de copain avec qui discuter de ça. Puis, je n’en discutais pas avec ma famille ni rien. C’est difficile d’en parler au début.
Pendant longtemps, j’ai été tout seul dans mon coin, à me renseigner sur internet ; c’est l’expérience qui m’a appris. Après, quand j’ai commencé mes paris sur le basket, je me suis rendu compte que je pouvais ne pas gagner pendant 500 paris, pendant 1000 paris de suite. Quand ça suivait une bonne période, c’était plus facile à encaisser.
Si je gagne pendant 2 mois, après, je ne gagne pas pendant 5 mois, c’est difficile de faire des paris tous les jours pendant 5 mois et ne pas gagner, mais au final, c’était stagné et puis j’avais fait un gain avant. Donc, mon bilan global était positif. C’est l’expérience qui m’a appris petit à petit.
Moi, avant même d’avoir les infos sur internet, puisqu’en France, il y avait très peu d’information sur les paris dans les années 2010. Grosso modo, j’ai appris beaucoup de choses tout seul avec l’expérience, donc en le subissant. J’ai subi l’aspect mental pendant des années, sans le maitriser. J’ai mis du temps à le maitriser et à le comprendre.
Audrey : Oui, avec ce que tu as vécu, tu as dû te poser vraiment et savoir faire face à toutes les situations, au final.
Antoine : Voilà ! oui, c’est un peu ça.
Audrey : Tu penses que quand on est un nouveau parieur, c’est difficile de se concentrer sur le long terme et que les phases de perte sur court terme, elles impactent beaucoup ?
Antoine : Ce n’est pas que je pense, c’est que j’en suis sûr. Pour rester en paris sportifs, il y a deux compétences à avoir. Première compétence, c’est trouver des valu bet, c’est-à-dire des paris qui sont intéressants et qui font gagner de l’argent à long terme. La cote est mal ajustée par le bookmaker. Le bookmaker, lui sachant que sa cote est représentative de la vie des parieurs. Donc, la première chose, c’est trouver de bons paris, ce qui est assez difficile.
La deuxième chose qui est probablement encore plus difficile, c’est l’aspect variance. C’est-à-dire que ce n’est pas normal d’être compétent, de trouver de bon pari, et pourtant de perdre sur 1000 bets par exemple, 1000 paris. Si quelqu’un va faire des paris pendant 5 ans, il va faire son bilan à la fin des 5 ans. S’il est perdant, il ne pourra pas tirer d’autre conclusion qu’il n’est pas compétent.
Alors qu’il peut l’être, il a pu tomber dans la mauvaise variance, sur des matchs qui ne sont pas tombés en sa faveur. Inversement, il aurait pu être gagnant au bout de 300 paris, se croire très fort, alors que finalement, c’est un coup de chance. Pourtant, son vrai bilan serait juste d’être à l’équilibre, voire d’être perdant peut-être.
L’aspect mental dans le monde du betting
Audrey : D’accord ! oui, c’est-à-dire que
Antoine : Donc, l’aspect mental au début, c’est très compliqué. Même moi, en ayant les connaissances que j’ai, ça me frustre si pendant deux mois, je suis convaincu que je fais du bon travail et que j’anticipe bien le marché, j’ai des indicateurs qui me montrent que globalement j’ai dû faire de bons choix ; et pourtant, ça ne paye pas. À court terme, ça ne paye pas.
Audrey : Donc, c’est toujours frustrant. Ce que tu dis, être détaché de tes résultats et que ça t’impacte moins. Est-ce que tu es réellement détaché à 100% ou ça t’impacte toujours quand même un peu ?
Antoine : Je ne pense pas qu’on puisse être détaché à 100%. Après, vu que ça fait 5-6 ans que je gagne, au final quand je perds ou quand je stagne. Notamment quand je perds, ce que je perds, c’est que des gains. C’est toujours facile de perdre des gains que commencer et perdre directement. Si jamais, je perds pendant 3 mois de suite, je relativise en me disant, finalement, ce que j’ai perdu en trois mois, c’est ce que j’ai gagné les deux mois d’avant par exemple.
Donc seulement, pendant 5 mois, il ne s’est rien passé. Donc, perdre des gains, c’est toujours facile. Par contre, commencer et stagner pendant 2-3 ans, perdre pendant 2-3 ans. Puis là en plus, je parle d’un parieur qui sera assidu, qui ferait un certain volume, qui a vraiment envie de gagner.
Le ne parle pas d’un parieur un peu récréatif qui n’a aucune notion de variance et qui va exploser en plein vol. Dès qu’il va prendre 3-4 pertes de suite, il va être dégouté, il va penser qu’il a fait de mauvais choix. Alors que ce n’est pas parce qu’on perd 4 paris de suite qu’on a fait de mauvais choix sur les 4.
Se détacher des paris sportifs
Audrey : D’accord ! Du coup, tu es forcement pas détaché à 100% parce que c’est aussi ton activité principale. Mais est-ce que tu arrives à te couper de temps en temps ? Par exemple, quand tu pars en vacances, est-ce qu’il y a des moments dans ta vie où tu te coupes totalement des paris ? Ou même si tu arrêtes de parier pour ton activité, tu aimes bien parier juste pour le plaisir, toi individuellement ?
Antoine : C’est marrant quand tu me poses cette question-là parce que c’est un thème dont je discute régulièrement avec des amis, le fait de réussir à couper ou pas. Pour moi, c’est assez difficile parce que ma stratégie est basée sur du volume. C’est-à-dire que je fais énormément de paris, entre 500 et 1000 par mois.
Après, c’est à moi de réussir à m’imposer des périodes de pause. J’arrive à en faire, mais assez difficilement. C’est-à-dire que même si je suis en vacances, des fois, je me dis qu’est-ce que ça me coute de jeter un œil 5 minutes le matin sur les matchs du jour ? Potentiellement, je pourrais gagner de l’argent avec ça. Je ne vais pas dire que ça gâche les vacances, pas du tout !
J’ai quand même la pensée de pari sportif le matin et peut-être le soir, voir le résultat. Donc, coupé totalement, ça m’est arrivé de la faire. Mais à chaque fois que je l’ai fait, c’est assez rare, j’ai vraiment apprécié, je me suis vraiment dit, là, tu oublies ça, concentre-toi sur le moment présent. Je pense encore à des axes où il fallait que je m’améliore. Finalement, une vraie distinction entre mon activité de pari sportif et une activité de vie quel qu’elle soit.
Audrey : Parce que c’était dur, par moment, d’être tout seul ? Puisque quand tu es parieur pro, tu travailles tout seul. Est-ce que c’est un avantage ou un inconvénient pour toi ?
Antoine : C’est les deux. J’ai connu des boulots où j’aimais bien l’ambiance avec les collègues, d’autres où pas plus que ça. C’est à la fois bien et pas bien ! C’est-à-dire que parfois c’est bien d’être chez soi, d’être lead de ses horaires ; mais parfois, on a envie d’échanger avec d’autres personnes. C’est pour ça que c’est l’intermédiaire.
Son regard sur l’évolution des paris sportifs
Audrey : Oui, c’est sûr ! Je voulais parler d’un autre grand sujet. Tu es dans les paris sportifs depuis presque 15 ans. Depuis que tu as commencé, tu as évolué jusqu’à aujourd’hui. Quel regard tu portes sur le monde des paris sportifs ? Toi qui en fais partie, qu’est-ce que tu en penses ? Est-ce que tu le vois d’une certaine manière ?
Antoine : Pas particulièrement
Audrey : Parce qu’il y a beaucoup d’aprioris négatifs. Et est-ce que ton regard a changé ?
Antoine : Moi, je suis un passionné de sport à la base. Donc, la première chose que j’aimerais, et ça, malheureusement, je ce n’est pas le cas, c’est qu’il n’y ait pas de trucage des matchs, de pression sur les joueurs. Et ça existe malheureusement, notamment au tennis, on en parle assez régulièrement. Les joueurs qui ne viennent pas beaucoup, on les soudoie pour truquer les matchs.
Ça, c’est un aspect très négatif des paris sportifs qui me déplait très fortement. Après, depuis t l’humanité, quasiment depuis que l’argent existe, les paris existent, les gens ont toujours voulu prier ; et il y a un combat de gladiateurs. Finalement, ce petit truc de défis est toujours resté notamment sur le sport, d’où le pari sportif.
Je ne sais pas pourquoi il y a ce petit côté un peu pari, défi, ni d’où l’humanité tient ça, mais c’est un fait, ça a toujours existé. Il y a même des pays comme en Asie ou en Angleterre où c’est beaucoup plus populaire. En France, l’image n’est pas très positive. Après, la génération jeune est beaucoup plus ouverte maintenant à ça. C’était peut-être quelque chose qui était un peu mal vu, il y a 20-30 ans.
Audrey : C’est vrai qu’aujourd’hui, il y a une vraie génération, il y a beaucoup plus de personnes qui parient en amateur et justement, qui ne sont pas forcément régulières et qui ne gagnent pas forcément. Je pense aussi qu’il y a un changement de vision, il y a un décalage entre les générations.
Et justement, parce qu’il fallait aussi aller au PU, et maintenant, c’est beaucoup plus accessible, c’est vrai. Vu que le monde des paris sportifs, c’est un monde très inconnu du grand public ; qu’est-ce que tes proches en pensent de ce tu fais ? Puisque tu es passé de prof de math à parieur, n’est-ce pas anodin ?
Antoine : Quand j’en ai vraiment parlé de manière sérieuse, la première réaction, c’était un peu la surprise. À la fois satisfait que j’aie réussie là-dedans et à la fois inquiet pour l’avenir dans le sens où le message que je recevais un peu, c’était « ce que tu as fait, c’est très bien.
Maintenant, tu ne peux pas vivre de ça, il faut peut-être arrêter tant que tu as encore des gains, avant de perdre … ». Donc il y a eu une partie de ce message-là. Après, quand j’ai vraiment expliqué ce que je faisais, c’est vraiment dur d’expliquer et de montrer que ce n’est pas un investissement au hasard, que c’est fondé sur des analyses, sur des aspects mathématiques sportifs, que ça ne peut pas être dû à la chance que j’ai gagnée.
Parce que ce n’est pas possible d’avoir eu de la chance à ce point-là, sur tout ce que je fais …en expliquant bien les choses, on réalise finalement que c’est des marchés qui évoluent. Il faut acheter à un bon moment, anticiper le marché, revendre si ça se passe mal. Ce n’est ni plus ni moins que de la bourse sauf que moi, c’est le sport qui me passionne.
Les algorithmes dans la tenue de ses bilans
Audrey : Et tes connaissances en mathématique, ça t’a vraiment aidé dès le départ ?
Antoine : Je dirais qu’au départ, non ! Là où ça m’aide, je pense, c’est plus par rapport à la variance. Sur 1000 paris, avec tel rendement, est-ce que c’est possible de perdre ? Et si oui, avec quelle probabilité ? Je pense que c’est plus cet aspect-là, mathématique, algorithme que j’ai développé depuis 3-4 ans pour me « rassurer » dans les périodes difficiles, à me dire finalement, ce que tu vis, ce n’est pas normal, ça arrivera par exemple une fois sur vingt. C’est peut-être sur ça. Puis, pour vraiment détecter une value, calculer mes cotes.
Audrey : Donc, ça t’a plus aidé peut-être pour travailler ton aspect mental et savoir gérer les différentes étapes de …
Antoine : Surtout pour travailler l’aspect variance qui est directement envoyé au mental puisque ces deux thèmes-là sont très liés.
Audrey : Tu penses que pour des parieurs qui peuvent être en difficulté, ou qui peuvent avoir un peu de difficulté à gérer l’aspect mental, ça peut-être des pistes d’évolution ?
Antoine : Je pense que oui, parce qu’il y a certain parieur, imaginons qui a envie de faire ses propres pronostics, il va faire tout ce qu’on lui dit, c’est-à dire il va prendre un cahier, un tableur, il va aller noter, etc. Il va mettre ses bilans, imaginons qu’il a perdu au bout de 100 pronostics, il va changer sa stratégie et va dire « si je n’ai pas gagné sur 100 matchs, c’est que je fais des erreurs probablement ».
Après, il y a différents indicateurs qu’il faudra prendre en compte pour vérifier si c’est vraiment, est-ce que l’aspect variance entre en compte ? Est-ce que c’était impossible d’avoir ces résultats ? Est-ce que c’était finalement probable que la perte puisse arriver ? On pourra dire après l’évolution des marchés s’il a bien anticipé les marchés sur ces matchs ou pas. Il y a plusieurs indicateurs qu’il faut prendre en plus que juste le résultat. La chance, c’est un petit échantillon.
La perception de son entourage sur son métier
Audrey : Est-ce que tu as déjà dû faire face à des réactions un peu étranges quand tu rencontrais une nouvelle personne, que tu leur disais que tu étais parieur pro ? Ou les gens sont compréhensifs ?
Antoine : La très grande majorité des gens sont compréhensifs. Ils disent « tu fais ça, t’arrives, tant mieux ». Certains sont sceptiques, ils n’y croient pas, ou ont du mal à y croire. C’est comme ce que j’ai tout à l’heure quand j’expliquais ce que j’ai : certains sont sceptiques, il faut les convaincre.
Certains resteront sceptiques peut-être. Après, en expliquant au début à quelqu’un qui n’y connait rien, il peut avoir la vision négative, mais en expliquant vraiment la façon dont on peut le faire, des gens peuvent changer d’avis. Donc, la grande majorité le prend bien et certains sont sceptiques.
Audrey : Tu arrives vraiment à expliquer ton métier et ce que tu fais à des personnes totalement novices ?
Antoine : Plutôt oui ! C’est assez simple, les évènements, j’anticipe des marchés, les cotes redéfinissent des probabilités qui reflètent la vie des gens. Donc, la masse des gens ne peut pas avoir raison sur tous les marchés, et je gagne parce que la masse des gens se trompe. Très rapide, mais …
Audrey : Oui, c’est facilement compréhensible aussi comment ça fonctionne le pari sportif. Est-ce que tu as es objectifs pour plus tard ? Est-ce qu’il y a des choses que tu as envie de faire, que tu as envie d’explorer ?
Antoine : Là comme ça, pas spécialement. Je ne sais pas si je ferais des paris toute ma vie, mais je me dis que je me fais confiance pour faire un truc qui me plait si j’ai à passer sur autre chose. Puis si je continue là-dedans, je continuerais là-dedans.
Gérer son quotidien
Audrey : D’accord ! Tu es pris par le pari, ça, c’est ton activité. Est-ce qu’il y a des choses que tu aimes bien faire ? Autre chose pour te sortir un peu du pari, même si tu es dedans toute la semaine, mais pour te sortir un peu du pari, te changer les idées …
Antoine : Oui, je fais pas mal de sport, j’aime bien partir voyager à l’étranger même si en ce moment c’est compliqué, j’ai des amis. Franchement, je suis très heureux dans la vie. Donc, je suis très content de ce que je fais. Le pari c’est une activité principale.
Là à l’été, il est un peu plus calme, de juin jusqu’à septembre, je vais avoir beaucoup plus de temps libre pour faire des sports, voir des amis, partir en vacances. Moi, j’arrive à profiter, je ne fais pas que des paris toute ma vie, toute ma journée, tout le temps, je n’ai pas la tête que là-dedans non plus.
Audrey : Oui, c’est peut-être aussi bénéfique pour le moral et pour le mental de ne pas être tout le temps dedans.
Antoine : Voilà ! Plus j’ai de l’expérience et plus j’avance, plus j’arrive à prendre du recul sur certaines choses. Il y a des trucs que je fais maintenant que je ne faisais pas il y a 2-3 ans avant. Souvent, moi je prenais les paris en ouverture de marché, quand le match vient de sortir. Avant, si les matchs venaient de sortir, je les avais tous regardés pour voir s’il y a un truc intéressant ou pas.
Là, si j’arrive et que je n’ai pas envie, je fais autre chose. Ça, c’est un truc que je ne faisais pas avant. Maintenant, avec le recul, je me dis « ce n’est pas grave, tu prends ton temps pour faire autre chose. Tu es avec des gens, tu es avec n’importe quoi ». Même tout seul, si je n’ai pas envie de le faire, je n’ai pas envie de le faire. Je verrais demain matin, si j’ai les opportunités, j’ai les aurais, si je les ai loupés, ce n’est pas grave.
Il y a une phrase que je dis souvent, il est plus facile à dire, mais il n’est pas si facile que ça à réaliser c’est : « il faut que le betting (pari sportif) soit au service de la vie et pas l’inverse ». C’est-à-dire que le pari sportif doit être un élément pour rendre ma vie bien. Par contre, je ne dois pas sacrifier ma vie pour ça. Sinon, ça n’a aucun sens.
Audrey : Profiter des autres choses, et puis s’y consacrer.
Antoine : Voilà, c’est mon activité principale, donc, j’y passe du temps. Je mets des choses en reste pour réussir. Mais je ne mets pas toute ma vie sur ça. J’ai d’autres choses à faire qui sont plus importantes que ça.
Audrey : D’accord ! Je trouve que c’est bien d’en parler parce que chez certaines personnes, ça peut tomber dans l’inverse et là, ça peut être dangereux.
Antoine : Il nous faut un peu les limites. Je pense que ça a dû m’arriver d’être frustré parce que je savais qu’il y avait des paris à prendre et je ne pouvais pas les prendre puisque j’étais à tel endroit. Du coup, je ratais les deux, je ratais l’instant présent que je vivais et je ratais mon activité de pari , j’étais frustré dans les deux.
Avec le temps et l’expérience, j’ai réussi à compartimenter. Le pari, c’est de côté, je profite de ça ; ensuite là, je me concentre sur ça ; et essayer de faire la distinction. Mais comme c’est une activité qu’on fait finalement chez soi, même sur son téléphone, c’est une activité que je peux faire tout le temps.
Ce n’est pas comme si je devais aller dans un bureau, la délimitation serait simple : je rentre au bureau et je travaille, je quitte le bureau et c’est fini. Là, c’est à moi de m’imposer mes règles. Donc, j’arrive de plus en plus à en faire, mais ça a mis du temps quand même de faire la distinction entre vie perso et vie professionnelle.
Conclusion
Audrey : D’accord ! Merci beaucoup, c’est très intéressant de parler de tout ça, de tout l’aspect mental qui est difficile à gérer aussi pour les nouveaux parieurs et sur lequel il faut beaucoup travailler puisque ça demande beaucoup de travail. Déjà dans la vie de tous les jours, puis, dans ce métier-là encore plus. Dans ce métier et cette passion, parfois aussi ce loisir, ça demande beaucoup de travail. Mais c’était très intéressant. J’espère que va servir à d’autres.
Antoine : Tu as raison, l’aspect mental, pour les paris sportifs, ça peut être un investissement. Après, comme je le dis, il ne faut pas que ça devienne une drogue, qu’on s’enferme là-dedans, qu’on veille à tout pris prendre tous les paris et qu’on suive les tipsters. Il faut accepter si est en droit, l’opportunité passe, il y aura toujours des opportunités. Il ne faut pas se gâcher la vie pour ça. On peut faire des efforts pour réussir là-dedans, mais pas à tout sacrifier pour ça. Il faut réussir à jongler entre les deux. C’est ça qui est assez difficile : trouver la frontière.
Audrey : Oui, il faut savoir délimiter et mettre des barrières, au final.
Antoine : Voilà ! Et puis, après, être suffisamment formé sur l’aspect mental pour connaitre. Si peu de gens gagnent, c’est quand même qu’il y a des raisons, c’est qu’il y a des paramètres à prendre en compte et qui sont difficiles à maitriser. Et souvent, l’attitude qu’on a, moi, j’ai eu, et je pense que d’autres l’ont en tant que débutant, c’est qu’on pense que c’est facile, on se dit « c’est facile, moi, je mets de l’argent, je devine qui gagne et je gagne ». Si c’était facile, il n’y aurait pas des opérateurs. Si tous les gens gagnaient, donc …ça reste difficile quand même quelque part.
Audrey : Si c’était facile, les bookmakers n’auraient pas autant d’argents
Antoine : Voilà !
Audrey : Bien, merci beaucoup.